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Quand les mangas viennent au secours des temples japonais

Quand les mangas viennent au secours des temples japonais

Yasuyuki Saito a imaginé toutes sortes de façons d’attirer des visiteurs dans son sanctuaire shinto, sans succès, jusqu’au jour où ses deux nièces se sont amusées à dessiner des personnages de manga sur des panneaux du lieu saint.

 

« Personnellement, je n’ai aucun intérêt pour les personnages de dessins animés. Et j’étais en colère contre mes nièces car je pensais que les fidèles auraient trouvé ces dessins irrespectueux », nous confie Saito, le prêtre en chef du sanctuaire Kamishinmei Tenso Jinja situé dans le quartier résidentiel de Futaba.

« Mais quand les fidèles ont commencé à demander s’ils pouvaient ramener ces panneaux d’indication griffonnés chez eux, j’ai réalisé qu’ils avaient trouvé un moyen d’atteindre les gens d’une manière à laquelle je n’aurai jamais pensé. »

L’incident des graffitis, dans ce sanctuaire datant de la période Kamakura (1192-1333), a eu lieu il y a environ quatre ans, indique Saito.

Alors qu’il était en déplacement dans un autre sanctuaire, ses nièces, alors adolescentes, (elles ont désormais une vingtaine d’années, une travaille dans une entreprise et l’autre est à l’université) ont commencé à dessiner des personnages mignons basés sur les objets sacrés environnants.

2La cloche destinée à être secouée par les visiteurs désirant attirer l’attention des dieux, ou encore l’Ōnusa du prêtre (une baguette en bois avec des banderoles en papier washi utilisés lors des rituels de purification) ont ainsi été représentés sur les panneaux destinés à diriger les fidèles vers le registre du sanctuaire ou vers la boîte à offrande.

« Au lieu de se fâcher en voyant ces graffitis, les femmes âgées, venant régulièrement prier ici, les ont appréciés», avoue Saito.

« Je pense que ces dessins ont touché une corde sensible chez les fidèles, les ramenant à des jours heureux. Beaucoup d’entre eux vivent seuls et voient peu souvent leurs enfants et petits-enfants. Cela leur donne l’impression d’être à leur côté. C’est là que j’ai réalisé que ces personnages ont le pouvoir d’apaiser les gens et que nous pourrions les utiliser. ».

Saito a alors demandé à ses nièces de créer une affiche publicitaire pour le sanctuaire en 2014 – l’année du Serpent pour les Chinois.

Le duo a alors dessiné des filles et des chats brandissant des épées et des instruments de musique dansant à la gloire d’un serpent blanc légendaire, conférant richesse à ceux qui le voient dans leurs rêves. Les vieilles dames ont également apprécié, et de nouveaux visiteurs ayant entendu parler de l’œuvre sont venus.

Pleinement convaincu du pouvoir du « kawaii », Saito a lancé un concours de dessin de nouveaux personnages afin de stimuler les ventes auprès de la communauté.

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Des milliers de visiteurs se rendent au sanctuaire Kamishinmei Tenso Jinja et aux six temples et sanctuaires situés à proximité, lors du pèlerinage du Nouvel An (Shichifukujin – Les sept divinités de la bonne fortune), selon Saito. Cependant durant le reste de l’année, les sanctuaires et les temples n’attirent pas beaucoup de visiteurs venus de l’extérieur.

« Nous sommes petits et peu de gens ont entendu parler de nous, c’est pourquoi nous devons faire ce que nous pouvons pour attirer l’attention, non seulement pour nous, mais aussi pour nos communautés», explique Saito, expliquant que de nombreux petits magasins situés le long de la route du pèlerinage ont dû fermer leurs portes depuis l’arrivée de grandes surfaces. »

« Les visiteurs pourront venir regarder les personnages, mais ils auront faim et voudront des souvenirs. »

Bien que réticents au début, les autres temples et sanctuaires formant Ebara Shichifukujin, nom de la route du pèlerinage, soutiennent désormais cette initiative, dit Saito. Ils ont l’intention de créer un personnage unique pour chacun des arrêts situés le long de la route du pèlerinage.

3« Nous sommes tous confrontés au même problème, » indique le prêtre. « Les entreprises familiales situées à proximité fermant les unes après les autres, les enfants qui auraient dû prendre la relève s’en vont pour trouver du travail ailleurs. De nombreux jeunes donnaient un coup de main lors d’événements communautaires et participaient aux festivals et aux cérémonies religieuses. Désormais, les participants sont vieux, et il y a peu de personnes à qui transmettre nos traditions locales. ».

Saito admet qu’il ne comprend toujours pas « le charme des personnages mignons. »

« Si mon père ne m’avait pas arrêté, j’aurais détruit le graffiti de mes nièces.» dit-il. « Désormais je pense qu’ils sont devenus une passerelle qui atteint non seulement les anciens mais attire également de nouveaux venus. »

Les dessins réalisés pour le concours de création de personnages seront exposés, du 14 au 31 Mars, dans les sept temples et sanctuaires, où les fidèles peuvent voter pour leurs favoris.

Le sanctuaire Kamishinmei Tenso Jinja est situé au 4-4-12 Futaba dans l’arrondissement de Shinagawa à Tokyo.

Voir le site officiel : http://hebikubo.jp/

 

Source : Asahi || Images : Asahi

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