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Tourisme clandestin au Japon : la situation dégénère

Tourisme clandestin au Japon : la situation dégénère

Vous en avez sûrement entendu parler : le tourisme clandestin fait des ravages depuis quelques mois au Japon. Aujourd’hui encore, un groupe de 4 Français s’est fait arrêter en tentant de s’introduire illégalement sur le sol Japonais. Un phénomène social inédit qui reflète le désespoir des amoureux du Japon et une situation qui devient intenable dans le Pays du Soleil Levant. Décryptage.

 

Le phénomène dit du « covid long touristique »

 

Avec le début de la pandémie actuelle, cela n’a échappé à personne, le monde s’est tout simplement arrêté. Vols annulés, visas révoqués, les chamboulements ont été particulièrement lourds et difficiles à encaisser pour les fans du Japon. « On me privait d’un rêve d’enfance, et j’ai commencé à faire une dépression » témoignait à l’époque Thomas Pesci, étudiant en master d’ichtyologie à Brest.

Comme beaucoup d’autres, Thomas avait prévu d’aller au Japon pour la saison des sakura (cerisiers du Japon), en 2020. Et cerise sur le gâteau, il avait réussi à obtenir une des rares places pour un échange universitaire à 北海道海魚専門大学 (Hokkaido kaigyo senmon daigaku), la prestigieuse université d’ichtyologie de Hokkaido.

Le cas de Thomas n’est pas isolé : des dizaines de milliers de touristes et étudiants ont été forcés de reporter leurs plans, sans aucune autre visibilité sur la réouverture des frontières nippones que les informations contradictoires quasi-quotidiennes données par le gouvernement japonais. A tel point que certains portent plainte et exhortent le Japon à ouvrir ses frontières, et que d’autres finissent par tenter « le tout pour le tout ».

 

Une véritable crise sociétale

 

Depuis de longues années, les tentatives d’immigration clandestine de fugitifs Nord-Coréens est monnaie courante au Japon. Pourtant, le gouvernement japonais (alors dirigé par le premier ministre Suga Yoshihide) a annoncé en Septembre 2021 que le nombre d’immigrants clandestins d’origine européenne avait pour la première fois dépassé celui des Nord-Coréens. Plus surprenant encore : ces clandestins européens viennent pour la plupart dans le seul but de visiter le Japon, et non pour s’installer définitivement ou y travailler.

On se souvient de cette déclaration ubuesque de Suga : « Nous comprenons et apprécions pleinement l’attrait de nos amis européens pour notre beau pays. Mais nous vous demandons de bien vouloir respecter les règles comme tout le monde, car nous ne ferons pas de différence entre les arrivants illégaux ; et nos sanctions sont sévères », suivie d’un renforcement des contrôles aux frontières portuaires et aéroportuaires, sur l’intégralité du territoire.

 

Les Français arrêtés n’en étaient pas à leur coup d’essai

 

Revenons à nos compatriotes désespérés ayant vainement tenté d’atteindre la terre promise japonaise. Parmi eux : Thomas Pesci (voir plus haut) que nous avions interviewé en Juin 2021 lorsqu’il avait été renvoyé en France après avoir tenté de passer la frontière japonaise avec des documents devenus obsolètes à cause des nouvelles réglementations Covid.

Comme lui, ses compagnons avaient tenté de s’introduire au Japon en redoublant d’ingéniosité. L’un avec des documents falsifiés, l’autre en soudoyant le propriétaire d’un bateau de pêche japonais. Tous renvoyés sans autre formalité et sans avoir pu vraiment passer la frontière, ils ont décidé de tenter leur chance une nouvelle fois, en se cachant cette fois dans un container aménagé spécialement pour leur voyage.

Après avoir supporté un voyage de près de 3mois au départ du Havre, les quatre compères y ont cru. Vraiment cru.
30 Mars 2022, 4h20. Préfecture de Shiga (滋賀), dans la petite ville portuaire de Tsuno (角), Thomas Pesci et ses compagnons de fortune ouvrent la trappe de leur container et inhalent l’air frais de l’aube à pleins poumons. Un air doux au parfum de liberté et d’accomplissement. Un nouvel espoir illuminé par les premiers éclaircissements d’un ciel sans nuage, comme une promesse d’un avenir meilleur. Ils dégustent ces instants précieux, mais pas longtemps : ils doivent se dépêcher pour rejoindre leur contact, Mlle Sak Ana, une jeune femme d’origine indienne installée au Japon depuis près de 10ans.

Pourtant, à peine 48h plus tard, Thomas et ses amis se font arrêter dans un game center de Shinjuku. Fichés lors de leur précédente expulsion, ils auraient été reconnus lorsque la police a été appelée pour calmer la situation lorsque l’un des amis de Thomas s’était énervé contre le manager en l’accusant « à tort » d’avoir truqué la machine UFO Catcher où il tentait de gagner une peluche Demon Slayer depuis plus d’une heure.

« On a mis toutes nos économies dans ce voyage. C’était ça ou rien. Je savais, moi, que je ne pourrais pas étudier comme prévu à Hokkaido. Mais je voulais au moins voir et profiter de ce pays dont je rêve depuis si longtemps. Et finalement, on a tout perdu » déclare Thomas que l’on retrouve amaigri, dans une vidéo poignante où il ne contient que difficilement ses larmes.
Une affaire terrible témoignant d’une crise inédite, que nous allons suivre de près.

En attendant, Nippon Connection apporte tout son soutien à Thomas et ses amis, et nous avons lancé une pétition pour obtenir leur libération que vous pouvez signer en cliquant ici.

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