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Interview de Gérald, un Martiniquais résidant au Japon

Interview de Gérald, un Martiniquais résidant au Japon

Salut Gérald ! Je suis très heureux de t’avoir en notre compagnie pour cette petite entrevue ! Pourrais-tu te présenter à nos lecteurs ?

 

Bonjour Eduardo ! Je suis moi aussi très heureux d’échanger avec toi, ainsi qu’avec tous les lecteurs de Nippon Connection ! Je me nomme Gérald et mon pseudo est Hélios, ou « le martiniquais au Japon ». 宜しくお願いします! Yoroshiku onegai shimasu !

 

D’où t’es venue l’envie de vivre au Japon ? Comment t’es-tu embarqué dans cette aventure ?

 

J’ai depuis longtemps une passion pour la langue japonaise. Je ne cacherai pas que tout a commencé avec les animés japonais lorsque j’étais tout petit ! Évidemment, au début, je les regardais en français, puis je me suis mis à regarder en version originale.

Et alors je me suis rendu compte qu’un sous-titre ne pouvait pas vraiment exprimer tout ce que pouvait exprimer un personnage dans une longue phrase, j’ai donc voulu apprendre le japonais. Tout d’abord, j’ai commencé seul. Mais je me suis heurté à un mur avec beaucoup de nuances que je ne pouvais pas comprendre sans l’aide d’un professeur de japonais !

C’est pourquoi j’ai décidé, malgré mes faibles moyens à l’époque (RSA) de commencer des cours de japonais avec un professeur (très compétente) et japonaise, dans la ville de Montpellier, Mme. Nobuyo Kojima. Elle m’a enseigné pendant 2 ans, avec quelques interruptions car quelques fois, je ne pouvais pas toujours payer les cours. C’était difficile.

Mais je me suis accroché ! Et un jour, alors que je m’y attendais le moins, elle m’a proposé une offre d’emploi… au Japon, dans l’entreprise d’une de ses connaissances qui cherchait un assistant en langue française. J’ai donc candidaté avec beaucoup de plaisir, et grâce à ma famille qui a sût m’encourager dans ce projet, j’ai pu boucler un dossier de demande de visa Vacances-Travail (Working visa).

Une fois le visa accepté, il a fallu commencer à préparer le départ, résilier les contrats dans les délais requis, vendre un maximum, et trouver une âme charitable pour me garder ce que je ne voulais pas vendre. 3 heures de train, un nuit à Paris, arrivée juste à temps à l’aéroport pour avoir assez de temps pour enregistrer les bagages et une gentille hôtesse qui comprenant ma situation, me laisse passer 2 ou 3 kilos en trop sur mon poids total de valise !

12 heures après ça, je me retrouve à l’aéroport de Narita, complètement fatigué mais heureux ! Le stress me garde éveillé constamment à tout ce qui se passe au tour de moi et je réussi à prendre le bus correct pour me rendre dans la ville de Fujishi ! Ma première difficulté s’est présenté à moi dès l’aéroport avec 3 numéros de téléphone qui ne marchaient pas ou sonnaient dans le vide…

Arrivée à Fujishi… oh miracle, mon patron est en train de m’attendre malgré les 1h 30 de retard dû à des embouteillages dans les environs de Tokyo !

Je rentre, je pose mes valises, prends une douche… et c’est déjà l’heure de mon premier cours de français, en compagnie du précédent assistant en langue française. Le cours a duré 2 heures environ. Puis nous sommes allés tous les 3 manger le dîner. Heureusement que j’avais (souvent) grignoté durant mon voyage !

Aujourd’hui, ça fait maintenant un peu plus de 2 ans que je suis ici, au Japon, toujours sur le même poste, avec divers postes de travail à temps partiel. En ce moment, des cours d’anglais, car le français n’est plus aussi populaire qu’il y a quelques années…

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Comment trouves-tu la vie sur l’Archipel ?

 

La vie japonaise est surprenante, et il faut tout le temps s’adapter ! Quelques fois avec succès mais toujours avec beaucoup d’efforts, en vivant constamment au jour le jour car ici, rien ne dure et TOUT CHANGE TRÈS TRÈS VITE ! Un exemple concret dans mon entourage physique direct : les élèves du début ne sont ceux d’aujourd’hui et ne seront pas ceux de demain. Il est en effet très difficile de garder des élèves à moins de se renouveler constamment et de travailler sans relâche !

Certains bâtiments qui étaient là, lors de mon arrivé, ont été détruits, rasés. De nouveaux flambant neufs les ont alors remplacés, et tiennent aujourd’hui leurs places ! Les équipes à la Mairie, par exemple, ont en partie changé et il faut sans cesse se présenter aux nouveaux ! La société japonaise me fait penser à une balle qui rebondirait constamment ! Si l’on ne sait pas rebondir, on est vite dépassé et mis en retrait !

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Du fait que tu sois Antillais, tu n’as pas la même pigmentation qu’un Japonais. Comment vis-tu cette différence de teint ? Te fait-on des remarques sur ta couleur de peau ?

 

Les japonais font très rarement devant vous des remarques qui pourraient mettre dans l’embarras. Aussi, non, je n’ai jamais eu de remarques directes concernant ma différence, mais je sais tout de même qu’il y en a. Comment est-ce que je le sais alors ? C’est très simple : une opportunité qu’on vous refuse ? un appel qu’on préfère adresser au patron (japonais) directement alors qu’on aurait pu passer par moi..? Tous ceux qui sont resté travailler ici le savent bien, il vaut toujours mieux avoir un(e) binôme japonais(e) avec lequel le client (japonais) préférera discuter !

Je suis différent : c’est une épée à double tranchant qui peut autant me permettre de réussir autant que d’échouer ! Il faut savoir jouer les bonnes cartes !

Je ne passe pas inaperçu et je m’en suis très vite aperçu dès le départ : lorsqu’il vous suffit de marcher le long du trottoir pour constater que toutes les voitures ralentissent à votre niveau… au risque de faire un accident. Vous avez vite compris le schéma ! Heureusement pour eux, les conducteurs ont fini par s’habituer… à condition que je ne sorte pas coiffé en afro…

Cependant, dans d’autres circonstances, c’est plutôt cool d’être différent. Pendant les diverses festivités d’été («matsuri» en Japonais), il me suffit de sortir habillé en yukata et coiffé en afro pour avoir le plus téméraire d’un groupe d’amis me demandant une photo avec eux ! Ça ne permet pas des contacts durables, mais c’est assez plaisant !

Les médias locaux, journaux et TV aiment aussi mettre un peu de couleur dans ce qu’ils réalisent et si je suis dans les parages, c’est tant mieux pour leurs pages/reportages qu’ils appellent «Activités Internationales» ! Pour autant, je ne souhaite pas m’investir plus dans cette voie, car ne parlant pas assez bien japonais, ça serait trop s’approcher et se brûler les ailes !

La règle d’or pour attirer, ici au Japon, est de savoir rester à sa place. La 1ère page, même d’un très petit journal me serait tout à fait inaccessible, je suis réaliste; par contre, la page internationale me tend les bras : c’est là ma place, et au Japon, chaque chose doit être à sa place !

Ce qui me gêne par contre, c’est l’imagerie populaire associée aux Noir en général. Les journaux et magazines mettant en couverture des Noirs sont soit des journaux de sport (football, baseball, boxe, basket…), soit de vêtements streetwear portés par des modèles percés, tatoués et/ou des dents en or, soit de musique ( jazz, DJ, rap, etc…). Heureusement, on constate tout de suite que je ne fais pas partie de cette catégorie car je porte volontiers cravate et veste.

Néanmoins, je tresse mes cheveux. Bien que cela soit fait proprement, je suis loin des cheveux bien lisses et bien raides des japonais : je ne pourrais donc jamais travailler dans une grosse structure, type collège/lycée à moins de me raser complètement la tête. Les «Great Teacher Onizuka», ça n’existe que dans les mangas !

 

Jusqu’à présent, quel a été ton meilleur souvenir du Japon ?

 

Mon meilleur souvenir du Japon ? Je l’avoue avec un visage très intimidé : c’est le reboot de mon animé préféré : Sailor Moon , car je suis aux premières loges pour acheter directement sur place du magnifique merchandising, et certainement même des articles qui n’arriveront jamais jusqu’en France !

Je ne suis pourtant pas un geek et je ne m’y connais guère, mais les 2 ou 3 séries que j’aime, je les aime à 200% !

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Quelle est la clef du succès quand on veut vivre dans un pays aussi fluctuant que le Japon ?

 

La clef pour réussir dans ce pays: toujours se réinventer et ne jamais se reposer sur ces lauriers; garder le sourire et la politesse en toute circonstance, mais surtout, surtout, SURTOUT : APPRENDRE CONSTAMMENT LA LANGUE JAPONAISE et ne jamais relâcher ses efforts ! Et croyez-moi, il y a du pain (ou du riz blanc) sur la planche ! Alors bon appétit !

 

Un dernier mot pour les lecteurs de Nippon Connection ?

 

OUI 🙂

Qui veut voyager loin ménage sa monture : Le Japon vous fait rêver ? Vous voulez y aller ? Très bien ! Mais préparez-vous avec précaution, avec un grosse marge financière car le Japon est un pays qui coûte cher !

Gardez contact avec des personnes fiables en France : Vous ne savez jamais comment les choses évolueront et le vent tourne très vite !

Le Japon est le pays où l’on fabrique les mangas, pas là où on les vit ! Le monde du travail est aussi stressant que le monde des mangas est amusant et divertissant !

Vous correspondez avec un ou des japonais, et ce sont vos amis ? Prenez bien en compte que la conception de l’amitié est différente au Japon ou en France : la caissière que je croise toute les semaines dans mon supermarché habituel est pendant 30 secondes «mon amie» !

Apprenez la japonais et maîtrisez-le chaque jour toujours mieux ! Lisez ET écrivez, mais surtout PARLEZ ! C’est la clé de voute de votre réussite au pays du soleil levant !

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Si l’interview de Gérald vous a plu, n’hésitez pas à le suivre sur sa chaîne YouTube « Un Martiniquais au Japon » en cliquant ici !

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